Accéder au contenu principal

Quatre métaphores lovecraftiennes

Quatre métaphores lovecraftiennes 

Le mythe de Cthulhu, c'est avant tout deux univers qui s'entrechoquent, la vie normale d'un personnage commun qui tombe nez à nez avec l'horreur de son existence; le nihilisme d'une réalité où tout est possible et rien n'est compréhensible. La folie brutale et tragique de l'univers. L'effacement de l'histoire du présent dans le vaste champs chaotique de l'infini. En des termes plus simples, il y a des éveillés et des endormis. 

Police secrète, intelligence artificielle, société panoptique, économie de l'attention, transhumanisme, surveillance généralisée, état d'urgence permanent, attentats terroristes, militarisation des états, explosion des conflits liés aux changements climatiques, aux ressources énergétiques, aux identités ou des mouvements de populations, la fuite du capital en dehors de la portée des États, l'isolation du capital et de la reproduction sociale; d'un côté la dure réalité d'un monde remplie d'horreurs et de l'autre, le monde du spectacle.

Ce qui m'impressionne le plus de l'univers de Lovecraft c'est le monde des rêves (Dreamworld). Dans ce monde se situe une copie du nôtre, mais qui ne fonctionne pas exactement selon les codes de notre univers. Le héros de Lovecraft, dans le monde des rêves, voyage dans un monde qui n'est pas monde et qui n'est ni fixe dans le temps ou l'espace. Mais son existence dans cet univers est très réelle et s'ajoute à l'existence réelle en dehors du monde irréel du monde des rêves.

Le monde des rêves, le monde des idéologies, le monde des idées, des identités, nous permet d'accumuler deux existences sur deux plans de la réalité. La réalité d'une vie normale à vivre et la vie irréelle du récit idéologique.

La troisième raison est purement un sentiment esthétique face à la réalité des "sciences économiques". Tout comme Léviathan vient des créatures mythiques des textes de la Bible :"C'est l'art, en effet, qui crée ce grand LÉVIATHAN, appelé RÉPUBLIQUE ou ÉTAT (civitas en latin) qui n'est autre chose qu'un homme artificiel, quoique de stature et de force plus grandes que celles de l'homme naturel, pour la défense et la protection duquel il a été conçu." - Thomas Hobbes, Léviathan. 

Car qu'y a-t-il de mieux pour représenter l'ordre croissant des méga corporations comme Total, déterritorialisées, présentes dans des dizaines d'États, ayant des dizaines, voir des centaines de milliers ou des millions d'employés vivant de près ou de loin dans un nouveau mode de totalitarisme, avec des tentacules qui nagent dans tous les secteurs d'activités économiques, politiques et même religieux, donc un organisme gigantesque indescriptible et tentaculaire comme les grands anciens le sont dans l'univers de Lovecraft: "En lui, la souveraineté est une âme artificielle, car elle donne vie et mouvement au corps tout entier..." (Hobbes)

"Nous avons besoins d'un antidote souverain contre toutes les formes de réalisme." - Michel Houellebecq, H.P. Lovecraft contre le monde, contre le vie.

Dans le mythe de Cthulhu, on vit l'explosion et l'effacement de l'histoire, mais aussi l'égarement dans le temps. Tous les repères réalistes devenant difformes et malléables, il n'y a que par le folie qu'on pourrait tenter d'y faire un peu d'ordre.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Les malentendus de Michel Foucault

Les systèmes de pensée totalitaires ont souvent ceci de commun entre-eux que d'être construits sur les ruines d'oeuvres antérieures révisées par des contemporains pour les goûts autoritaires du jour. Le pillage se fait trop souvent de manière grossière, voir même sur la base de mensonges ou de faux documents. C'est ce même constat que l'on peut faire en lien avec les malentendus autour de l'oeuvre de Michel Foucault, utilisée abondamment par les Judith Butler et autre activistes intersectionnels qui se sont institués comme juges, jurés et bourreaux de l'homme-blanc-hétéro-cissexué.  Premier malentendu : l'oeuvre, la vie, le travail, la passion  Quand on me parle de l'apport de Michel Foucault, plutôt que de faire comme certains et séparer sa vie de manière chronologique entre « deux moments » - un moment « structuraliste » et un autre « post-structuraliste » et autres niaiseries du genre - , je préfère parler de l'homme à travers les différentes es

L'ordre libertaire

L'ordre libertaire J'écris depuis l'été de mes vingt ans. Mes premiers textes ont été des lettres que je n'ai jamais envoyées et des poèmes que je n'ai jamais récitées à des femmes qui ont traversé ma vie en coup de vent. Venant d'un milieu pauvre et ayant grandi dans un foyer qui réprimait l'éducation des livres, j'ai vieilli avec un manque de culture ainsi qu'un manque de confiance en moi. C'est pourquoi j'ai toujours apprécié, malgré les tourments de l'intimidation, mes journées à l'école. J'ai commencé ma vie d'adulte en me tournant vers la science comme une porte de sortie. Comme si la technique et les formules mathématiques avaient pu m'émanciper des brumes de l'alcool de mon beau-père colérique. J'ai vite compris le poids de ce genre de chemin et c'est en vivant l'amour pour la première fois que j'ai découvert une partie de moi. Une partie de moi qui demandait plus que ces théorèmes et c

Le somptueux banquet des festins tragiques

Le somptueux banquet des festins tragiques En cette magnifique saison de Noël et afin de nous libérer des horreurs terroristes, l'Occident continue sa fuite existentielle vers le vide extrême de ses idéaux humanistes. Le temps médiatique ne durant que l'espace entre deux pauses publicitaires charnelles, il est important d'oublier les menaces à notre démocratie en promouvant non pas la croissance des individus mais plutôt l'idéal de l'homme faisant des achats à rabais métaphysiques. Le saint-libéral ou serait-ce le sein consumériste? Le nihilisme de l'après-guerre et l'échec retentissant du marxisme autoritaire aura promu la corruption libéraliste au rang de divinité d'un horizon indépassable. Assumant la transition, la Médiocratie transcende notre esprit avec sa gouvernance et sa boulimie du culte de la croissance économique, le tout en vomissant de la précarité, des inégalités et de la répression pour tous. La gouvernance est un épisode psy